Johann Wolfgang GOETHE
Dès son entrée en France, GOETHE se dirigea vers le camp de PRAUCOURT (Hameau de la commune de UGNY) et découvrit là l'armée prussienne qui lui fit une mauvaise impression. Il n'y avait ni sentinelles, ni postes, ni personne qui demande les laisser-passer. On se perdait à travers un désert de tentes. Le sol humide, profondément labouré, était mauvais pour les chevaux et les voitures. L'écrivain fut frappé par l'inhumanité et l'incohérence de cette situation. Le temps effroyable amenait chacun à chercher un misérable abri.
Quand GOETHE réussit à retrouver le régiment du Duc de WEIMAR avec ses quelques compagnons, tous se réjouirent de se retrouver entre visages connus.
GOETHE écrit : « … La pluie faisait déborder un fossé qui, creusé en des temps immémoriaux, devait détourner l'eau des champs et des prairies. Mais ce fossé, en un clin d’œil, était devenu le réceptacle de toutes les ordures et de tous les déchets. Il débordait, entraînant la dispersion des immondices au milieu des tentes. »
GOETHE découvrit là l'armée prussienne qui lui fit une mauvaise impression. Il n'y avait ni sentinelles, ni poste, ni personne qui demande les laisser-passer. On se perdait à travers un désert de tentes. Le sol humide profondément et labouré était mauvais pour les chevaux et les voitures. L'écrivain fut frappé par l'inhumanité et l'incohérence de cette situation. Le temps effroyable amenait chacun à chercher un misérable abri.
Il réussit à retrouver le régiment du Duc de Saxe WEIMAR avec ses quelques compagnons, tous se réjouirent de se retrouver entre visage connus.
Ce soir-là, GOETHE ira passer la nuit dans la grande "dormeuse" dont depuis longtemps il connaissait le confort. Cette "Dormeuse" qu'on retrouvera citée à plusieurs reprises, permettra à l'écrivain, durant tout ce voyage, de trouver des moments confortables dans un monde chamboulé. Mais ce soir-là, il y a tellement de boue qu'il devra s'y faire porter.
C'est dans ces circonstances que GOETHE se réveilla, le jour de son anniversaire, le 28 août, il avait 43 ans…
La Révolution française
Le 10 août, à PARIS la foule prend d'assaut le palais des Tuileries où séjournaient LOUIS XVI et sa famille. La journée du 10 août 1792 est, après le 14 juillet 1789, l'une des journées les plus décisives de la Révolution française, au point que certains historiens la qualifient de « Seconde Révolution ».
L'empereur d’Autriche, LEOPOLD II, frère de la reine MARIE-ANTOINETTE, l'épouse de LOUIS XVI, avait d'abord regardé la Révolution avec sérénité mais il devient de plus en plus inquiet lorsque la Révolution se radicalise. Le 27 août, Léopold II et le roi FREDERIC-GUILLAUME II de Prusse, après avoir reçu en consultation des nobles émigrés français, publièrent la déclaration de Pillnitz qui officialisait l’attachement des monarques d'Europe au bien-être de LOUIS XVI et de sa famille et menaçaient de graves mais vagues conséquences quiconque les agresserait.
Cela n'eut pour effet que de renforcer la détermination de l'armée révolutionnaire à sauver la Nation.
Johann Wolfgang GOETHE
Un temps exécrable
En arrivant à Longwy, GOETHE, n'eût qu'une hâte, celle de se procurer des couvertures, à cause du temps exécrable. Il entra dans une boutique tenue par des jacobins (révolutionnaires), or celle-ci fut bien bombardée. Soudainement, un boulet tomba sur la boutique que GOETHE quitta précipitamment avec ses couvertures.
Premières impressions en France : On indique à GOETHE une auberge plus modeste mais sûre où il put prendre un repas.
Il y retrouva dans celle-ci de vieux camarades de guerre et de garnison. Il y avait là un mélange d'officiers de régiment des fonctionnaires de la cour de la maison de la chancellerie du duc de WEIMAR On se plaignait des chemins pénibles.
L'entrée en France se fit par le temps le plus effroyable et présentait sous le plus sombre aspect…
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La Révolution française
Le 20 avril 1792, la guerre éclate entre la France révolutionnaire et l’Autriche. La Prusse, alliée à l’Autriche, avec ses 42.000 hommes sous le commandement du Duc de Brunswick, se dirige vers la Lorraine.
La garnison de Longwy rendit la place facilement. La prompte reddition de la ville donnait confiance. Elle semblait en effet confirmer la promesse des émigrés français qu'ils seraient tous reçus à bras ouverts.
GOETHE nota toutefois la discorde qui régnait entre les royalistes français et ce qui restait des éléments Jacobins de la cité. C’était pour lui une image telle qu'il se l'imaginait de la France divisée, écartelée entre l'avenir et le passé.
Johann Wolfgang GOETHE
Quittant Praucourt, la colonne prussienne fut l’objet d’une inspection en passant devant le Duc de BRUNSWICK et le Roi de Prusse pour en contrôler sa bonne tenue. GOETHE, dans sa calèche, se fit arrêter par le roi demandant à qui était la voiture : "Au Duc de WEIMAR " s'écria GOETHE…et il passa avec quelques gens.
Plus tard il dira : « Peu de gens se sont vus arrêter par un plus noble contrôleur ».
Ils continuèrent vers Arrancy jusqu’au moment où, la route en meilleure état, GOETHE quitta la voiture et traversa Arrancy sur son cheval.
Les troupes avançaient péniblement sur des routes défoncées où le matériel transporté souffrait et se brisait, telles les roues des canons et des voitures. Les soldats étaient harassés, les fusiliers se traînaient, n'en pouvant plus. Ils entendaient sonner le canon de Thionville au loin en souhaitant être les victorieux…
La Révolution française
Le général Français DESPREZ-CRASSIER, commandant le camp de Fontoy, part le 19 août pour faire une reconnaissance dans la direction d’Aumetz.
Il se heurte au Prince de HOHENHOLE en marche avec son corps d’armée. La colonne autrichienne se trouve en présence des maigres forces françaises. Mais le général HOHENHOLE, prudent, en appelle au régiment d’infanterie d’Enen, de sa première colonne.
Soudain, deux escadrons des hussards de WOLFRADT chargent la cavalerie française et la repousse sur l’infanterie avant d’acculer l’ensemble sur des fossés difficiles à franchir. 200 français sont sabrés, 80 sont fait prisonniers et 180 chevaux capturés par les coalisés.
La déroute française est complète, cette bataille viendra renforcer l’idée que la victoire sera aisée.
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Là encore GOETHE vit les effets de la Révolution française en découvrant l'Abbaye de Châtillon en ruines. Une propriété ecclésiastique qui avait été vendue par des révolutionnaires, ses murs éventrés en partie renversés et détruits. Premier indice important de la révolution aux yeux de GOETHE.
Il s'interrogea également sur le comportement du Roi de Prusse envers le Duc de BRUNSWICK, tous deux rivaux sur la conduite à tenir dans cette bataille, le premier téméraire avançant "telle une comète" et le second plus disposé à observer. Lequel serait supérieur et déciderait en cas douteux ?
Question qui inquiétait GOETHE ; le temps dira plus tard qu'il avait raison…
La Révolution française
L'abbaye de Châtillon est une ancienne abbaye Cistercienne du XIIe siècle. Elle se situe dans la commune de Pillon, dans le département de la Meuse.
A la Révolution française, en 1791, on vendit le mobilier de l'abbaye et le bétail puis l'abbaye et ses dépendances. Elle fut adjugée à Nicolas LIEGEOIS, de Pierrepont pour 45 900 livres payables en assignats. On vendit également toutes les autres maisons, fermes et propriétés des religieux. L'acquéreur fit démolir l’église abbatiale en 1792.
Un arbre de la liberté fut planté par les révolutionnaires sur l’emplacement de l’abbaye.
De tout le monastère, il ne reste plus aujourd'hui que les bâtiments du fermier et une petite partie de la façade.
Johann Wolfgang GOETHE
L'environnement est agréable, le soleil brillait enfin et l'ombre des arbres fut un premier réconfort. Les broussailles à brûler pour le feu des cuisines ne manquaient pas, et un petit ruisseau coulait au bord de la clairière, bêtes et gens purent en profiter mais le souillèrent en même temps…
À cet endroit le ruisseau formait de petits bassins et GOETHE s’empressa de s’en approprier un, le défendant avec opiniâtreté en le faisant entourer de pieux et de cordes. Il s'attira les protestations bruyantes de gens qui voulaient le partager avec lui.
Les troupes qui avançaient ne réquisitionnaient pas, elles faisaient des emprunts forcés. Des bons avaient été imprimés que le commandant avait signé, et le porteur les remplissait selon ses besoins et toujours LOUIS XVI paierait… Provoquant l’inverse de ce que recherchait cette alliance, car cette pratique excédait de plus en plus le peuple français contre le roi…
(Suite sur notre site internet via le QRC ci-dessous))
La Révolution française
Prussiens et autrichiens, et une partie de la France (les émigrés), continuaient de marcher au nom de LOUIS XVI, et ne faisaient qu'exaspérer le peuple contre la royauté.
En 1792, la place forte de Thionville, défendue par le général baron Félix de WIMPFFEN, devait subir un siège mémorable de deux mois. Elle fut assiégée le 24 août par une armée autrichienne de 20.000 hommes, renforcée par une armée de 16.000 émigrés français.
Citons, parmi les assiégeants de qualité, CHATEAUBRIAND, 23 ans, revenu exprès d'Amérique et qui y fut blessé.
De leur campement près de Arrancy, les troupes prussiennes et autrichiennes entendaient la canonnade de Thionville.
Un peu d'Histoire
A DAMVILLERS, si GOETHE n'a pas réalisé d'écrits, un peu d'Histoire s'impose.
Ainsi donc, Prussiens et Autrichiens, et une partie de la France (les émigrés), continuaient de marcher au nom de Louis XVI, et ne faisait qu'exaspérer le peuple contre la royauté.
Bien que la France n’ait déclaré la guerre qu’à l’Autriche, la Prusse s’était jointe pour soutenir son allié en vertu de la Convention de Pillnitz, signée le 27 août 1791, elle était une déclaration conjointe du Saint-Empire romain-germanique représenté par l'empereur Léopold II et du Royaume de Prusse représenté par Frédéric-Guillaume II. Elle avait pour but d'affirmer le soutien au roi Louis XVI alors en difficulté face à la Révolution française.
Signalons dans les personnalités natives de la commune de DAMVILLERS :
Johann Wolfgang GOETHE
Quittant Haumont-près-Samogneux, en descente sur la vallée de la Meuse, GOETHE raconte :
« La contrée était déserte et cette solitude absolue ne laissait pas d'être inquiétante. Montant et descendant dans les collines nous avions ainsi traversé Mangiennes, Damvillers, Wavrille et Haumont, lorsque sur une hauteur d'où on avait une belle vue, un coup de feu partit des vignes sur notre droite. Les hussards y courent pour fouiller des environs immédiats. En fait ils ramenèrent un homme barbu aux cheveux noirs qui avait l'air passablement sauvage et sur lequel on avait trouvé un mauvais pistolet de poche. Il dit d'un air insolent qu'il chassait les oiseaux de sa vigne et ne faisait de mal à personne. Le commandant, après un instant de réflexion silencieuse, pendant lequel il examina ce cas en le rapprochant des ordres modérés qu'il avait reçus, fit relâcher le prisonnier qui pouvait tout craindre, se contentant de lui faire donner quelques coups de plat de sabre. Le drôle les empocha et s’enfuit si précipitamment qu'il n’eut pas le moins du monde l'envie de ramasser son chapeau que nos gens lui avaient jeté après, en poussant les grands cris de joie »…
La Révolution française
On avait dit aux « libérateurs » que les paysans français, épouvantés par l'anarchie, abandonnaient la culture des campagnes et n'éprouvaient que de l'horreur pour la Révolution.
Ils virent des potagers bien entretenus, des champs ensemencés avec soin, des terres qu'on s'efforçait d'améliorer par un travail assidu. Ils entendirent les habitants vanter les bienfaits du nouveau régime. La Lorraine, écrit MINUTOLI*, où se développèrent en réalité toutes nos forces, était peut-être moins fanatique que le reste du pays, mais assurément la population était plus républicaine que royaliste. « Nous sommes des hommes, et non plus des esclaves ; d'ailleurs tout est moins cher, et la livre de sel, qui valait de six à sept sous, ne coûte plus que deux sous ».
*Heinrich MENU von MINUTOLI, né le 12 mai 1772 à Genève et mort le 16 septembre 1846 à Berlin, est un lieutenant général des armées du royaume de Prusse, un explorateur et un féru archéologue.
Johann Wolfgang GOETHE
Quittant Haumont, la troupe avançait calmement, en bon ordre. GOETHE était entouré de quelques personnes qui suivaient l'armée et formaient une petite société autour de l'écrivain.
Se dirigeant vers Verdun, ils firent une rencontre agréable. Un jeune garçon dans sa charrette cachait une jeune fille voulant se sauver chez des amis plus éloignés. Ils se retrouvèrent entourés de nombreux cavaliers, car ils s'étaient jetés dans "la gueule du loup" en se trompant de direction. Après avoir assuré à la jeune personne qu'elle ferait bien de s'en retourner, le commandant la ramena, rassurée, avec deux Hussards à ses côtés, vers son lieu de domicile à Samogneux où la troupe fut applaudie…
GOETHE : « Comme nous poursuivions notre route nous fîmes une rencontre aussi singulière qu’agréable, qui excita l'intérêt général. Deux hussards amenaient, en remontant la pente de la colline, une légère voiture à deux roues attelées d'un seul cheval. Quand nous demandâmes ce qu'il pouvait y avoir sous la bâche, nous vîmes un garçonnet d'environ une douzaine d'années qui conduisait le cheval et une jeune fille, ou une jeune femme, d'une beauté merveilleuse, qui se pencha hors de son coin pour voir les nombreux cavaliers qui entouraient son abri à deux roues. Nul ne resta indifférent mais nous dûmes abandonner le soin de s'occuper activement de la belle un notre sentimental ami qui, du premier moment où il eut considéré de plus près le misérable véhicule, éprouva le besoin impérieux de lui porter secours. Nous nous retirâmes à l'arrière-plan, mais lui s'informa minutieusement de tous les détails. Il se trouva que la jeune personne, habitante de Samogneux, village de la rive droite de la Meuse dans l'arrondissement de Verdun, dans l'intention de fuir le danger imminent, en se retirant à l'écart chez des amis éloignés, s’était justement jetée dans la gueule du loup. C'est un fait commun que dans ces cas angoissants comme ceux-ci, l'homme s'imagine qu'il sera mieux partout ailleurs que là où il est. Nous fûmes unanimes à lui représenter de la façon la plus aimable qu'elle devait s'en retourner. Notre chef lui-même, le commandant qui avait commencé par flairer un cas d'espionnage, finit par se laisser convaincre par la chaude éloquence de notre ami. Elle fut ramenée par deux honnêtes hussards, quelque peu rassurée jusqu'à son village, lequel fut traversé par la troupe dans un ordre irréprochable et une discipline qui les firent saluer amicalement par les villageois et la belle, debout sur un muret, au milieu des siens. Elle avait repris confiance en l'avenir, son aventure se terminant de façon agréable. »
La Révolution française
BRUNSWICK achevait son mouvement vers Verdun, il se tenait entre l’armée française de Sedan et celle de Metz et empêchait leur jonction. Il pensait avec raison que KELLERMANN s'efforcerait de donner la main à DUMOURIEZ.
Il envoya CLERFAYT vers Montmédy et Stenay pour retarder la marche de DUMOURIEZ et couvrir le siège de Verdun.
Il donna l'ordre à HOLENLOHE-KIRCHBERG d'investir Thionville, d'observer KELLERMANN et de protéger ainsi le flanc gauche des prussiens.
En ce qui concerne DUMOURIEZ, GOETHE le connaissait assez mal. Cependant il reconnaissait en lui que des qualités de ministre. Mais son habile campagne de l’Argonne, qui sauva la France, prouva qu’il était aussi un fin stratège.
Johann Wolfgang GOETHE
Comme GOETHE apercevait des soldats rangés autour d'un éboulis en forme d'entonnoir, et plein d'une eau transparente, il se mêla au groupe dans cette dépression où nageaient d'innombrables petits poissons que pêchaient les soldats avec les lignes qu'ils ne manquaient pas de transporter avec eux dans leurs bagages. Cependant l’écrivain, après quelques minutes, fit une autre observation.
« Les petits poissons, en se déplaçant reflétaient diverses couleurs. Tout d'abord, je crus que ce phénomène était produit par le jeu des couleurs changeantes des petits corps mobiles mais je ne tardai pas à avoir la satisfaction d'en trouver la véritable explication. Un tesson de poterie était tombé dans l'entonnoir, et il me renvoyait du fonds les plus belles couleurs prismatiques. Se détachant en clair sur le fonds et s’offrant en saillie à mon regard, il me présentait par le bord qui m'était opposé les couleurs bleues et violettes et au contraire par le bord qui était tourné vers moi les couleurs rouge et jaune. (…) Comme au reste je m'étais toujours occupé avec passion des phénomènes d'optique, j'éprouvais la joie la plus vive à voir ici en plein air, dans toute sa fraîcheur et son naturel un phénomène que, depuis près de cent ans, les professeurs de physique et leurs élèves ne pouvaient étudier qu’en s'enfermant dans une chambre noire. »
Traité des Couleurs - Une étude approfondie des chefs-d’œuvre de la peinture éveilla chez GOETHE le besoin de comprendre les lois qui commandent aux phénomènes visuels. Quel est le lien entre le clair-obscur et la couleur ? Quels sont les rapports des couleurs entre elles ? Pourquoi le jaune donne-t-il un sentiment enjoué, et le bleu une impression de tristesse ? Pourquoi notre œil produit il du rouge si on lui montre du vert, et vice-versa ?...
La Révolution française
Alors que le Roi de Prusse s’installe à Bras-sur-Meuse près d’une fontaine*, BRUNSWICK voulu asseoir son camp sur les hauteurs du mont Saint-Michel. On voyait de là Verdun entouré presque partout de coteaux plantés de vignes. On admirait ce joli tableau ; on se montrait, les uns aux autres, la ville au fond de la vallée où la Meuse coulait lentement au milieu des jardins et des prairies, les remparts bordés de tilleuls et de charmes magnifiques, plus à droite et sur une hauteur, la citadelle.
Pendant ce temps, Verdun s’agite et dans la nuit du 29 août, à la demande de BEAUREPAIRE, commandant de la place de Verdun, les gardes nationaux et tous les détachements qui tenaient la campagne aux environs de Verdun, rentrèrent dans la ville.
*Fontaine du Roi de Prusse, site visible en forêt de Bras
Johann Wolfgang GOETHE
GOETHE fit une assez belle description de Verdun, lorsque le soir après dîner, lui et ses amis se rendirent à quelques lieues à cheval sur les collines.
« La ville nous apparue par elle-même fort agréablement située, entourée qu'elle est de prairies et de jardins, dans une plaine riante qu’arrosent plusieurs bras de la Meuse, encadrée de collines plus ou moins lointaines ; mais comme place forte, elle offrait prise de toutes parts à un bombardement »
À minuit le bombardement commença.
GOETHE observait les deux batteries, l'une sur la rive droite l'autre sur la rive gauche, qui lançaient des fusées incendiaires efficaces, car peu après, un quartier de la ville flambait. Du haut de son point de vue GOETHE assistait au spectacle des hommes qui s'évertuaient activement à tâcher d'enrayer l'incendie.
Les obusiers faisaient un bruit terrible de tonnerre, insupportable à son oreille pacifique. GOETHE chercha à s'en éloigner. C’est ainsi qu'il rencontra le prince de REUSS, ambassadeur d'Autriche à Berlin, qui accompagna le roi de Prusse pendant toute la campagne. Il s'entretenait de la doctrine des couleurs et de son observation à Bras sur Meuse.
La Révolution Française
Le matin du 31 août le Duc de WEIMAR lui présenta l'aventureux GROTHAUS, officier prussien dont GOETHE avait fait la connaissance à WEIMAR en 1779. Celui-ci fut chargé de porter à VERDUN une sommation, accompagné d'un trompette-major. Cette mission mérite d'être rapportée :
« GROTHAUS avançait à cheval par la grand-route, le trompette devant lui et deux hussards derrière lui. Les gens de Verdun, des sans-culottes, lui tirèrent des coups de canon ; on attacha un mouchoir blanc à la trompette, en donnant l'ordre de sonner plus fort. Un détachement vint le chercher et le conduit seul, les yeux bandés ; ses discours ne produiront aucun effet, car il reçut un refus de se soumettre. »
Le bombardement cessa le premier septembre au matin, avec encore quelques tirs sporadiques de temps à autre. Vers 12h00 une seconde sommation fut adressée à la ville de Verdun, le 2 septembre la ville vote la reddition.
Johann Wolfgang GOETHE
Alors que des soldats quittent la place des hauteurs de BELLEVILLE, le long d'un mur où ils avaient couché, GOETHE remarque un phénomène qu'il croyait géologique, très surprenant à son sens. Sur le petit mur blanc bâti en pierre calcaire il vit une bordure de pierre d'un vert-clair rappelant la pierre de jaspe. Il se demanda avec surprise comment cela avait pu se trouver en grande quantité au milieu des couches calcaires. Le désenchantement ne tarda pas : en s'approchant il remarqua qu'il s'agissait tout simplement de mie de pain moisie que les Chasseurs ne pouvant manger avaient, en manière de plaisanterie, extraite du pain avec leur couteau et étendue sur le mur en guise d'ornement.
GOETHE : « Par le temps pluvieux que nous avions la promenade en ville n'avait-elle rien de particulièrement agréable. C'est pourquoi nous visitâmes aussitôt les célèbres boutiques où l'on pouvait avoir les meilleures liqueurs de toute espèce. Nous les goûtâmes et fîmes une provision de diverses sortes. Dans le nombre il y en avait une qui s'appelait le « Baume humain », et qui, moins sucrée, et plus forte que les autres, était particulièrement réconfortante. Mais nous ne fîmes pas non plus la fine bouche sur les dragées, petits grains d'épices recouverts de sucre et enfermés de jolis cornets cylindriques.
A visiter : le Musée de la Princerie, L’Usine de Dragées BRAQUIER, créée en 1783
Pendant que l'écrivain est encore tout à sa Théorie des Couleurs, à VERDUN le Commandant BEAUREPAIRE signe la reddition de la ville pour épargner sa destruction à la suite de quoi, il se suicida. Ses hommes transportèrent son corps jusqu'à Sainte Menehould où il fut enterré à l'Est au pied de l'église du Château,
Dans sa Campagne de France, Goethe mentionne avoir vu un personnage derrière les grilles d'une prison, qu'il a pris pour le Maitre de Poste de Sainte-Menehould, Drouet. Celui-ci se serait fait prendre maladroitement par les prussiens. Ce dernier ne semblait pas inquiet, paraissant parfaitement tranquille bien que les émigrés prétendissent qu'il méritait la mort. Mais son calme s'expliqua. Goethe avait fait une erreur : le prisonnier qu'il vit n'était pas le Maître le Poste Drouet, qui ne fut pris qu'un an plus tard à Maubeuge par les Autrichiens. Il s'agissait ici du maire de Varennes, Georges, qui, arrêté par des prussiens fut relâché dès le 23 septembre en échange du secrétaire du roi de Prusse, Lombard.
Un officier prussien, le comte de Henkel, lieutenant des hussards de Köhler, fut tué dans la rue Saint-Sauveur, par un soldat du 9e régiment de chasseurs à cheval. Le meurtrier s'était caché à l'étage supérieur de l'avant-dernière maison, en amont du pont de Saint-Airy. Il fut arrêté. On le mena au corps-de-garde du pont Sainte-Croix. Gœthe le vit le lendemain et raconte qu'il avait la figure belle, le regard assuré et une calme contenance. En attendant que le roi eût décidé de son sort, on lui avait lié les bras avec une corde au-dessus du coude. Mais le 6 septembre au matin, il se fit conduire aux latrines, sur le bord du parapet, à côté du pont ; la sentinelle s'était éloignée ; il resta quelque temps immobile, puis se renversant en arrière, se jeta dans la Meuse.
Goethe rapporte l'épisode dit des « Vierges de Verdun ». Des jeunes verdunoises font une démarche auprès du roi de Prusse, qui fut en réalité dictée par l'espoir d'apaiser la colère qu’on supposait chez ce roi, pour le meurtre du comte de Henkel
Avant de quitter VERDUN, GŒTHE et ses compagnons firent provision d'une liqueur appelé «Baume Humain» qui ragaillardissait, de même des dragées, spécialité qui existait déjà. La dernière soirée fut festive, réception avec des jeunes filles – à la destinée tragique – tenant d'agréables discours, fleurs et fruits en abondance. Repas copieux.
Siège rapide laissant présager aux troupes prussiennes que cette guerre serait sans doute courte dans sa durée.
La Révolution Française
Durant l’intense bombardement des Prussiens sur la ville de Verdun, le commandant de la place, BEAUREPAIRE, pressé par la bourgeoisie ne voulait pas voir sa ville brûlée et détruite, refusa la reddition. Il fut retrouvé mort en salle du conseil dans la nuit du 2 au 3 septembre, suicide ou meurtre...
La révolution Française a tranché, BEAUREPAIRE est un héros.
Noter que dès le soir du 2 septembre, deux détachements prussiens traversaient Verdun et marchaient, l'un sur Varennes, l'autre sur Saint-Mihiel, pour saisir ceux qu'on appelait les arrestateurs du roi de France.
Une fois la ville de Verdun tombée, les troupes s'installèrent tout au long de la route en direction de Paris. A Thierville, au lieu-dit "Jardin Fontaine", Goethe rejoint le bivouac des troupes du Duc de Saxe Weimar. Plus loin, le Duc de Brunswick s'installe à Regret et le Roi de Prusse à Balaycourt. On confondait plaisamment les noms de Glorieux et de Regret qu'on déclarait prédestinés ; le hasard, disait-on, se plaît à ces coïncidences, il fait loger à Glorieux le roi ardent et avide de renommée, et à Regret le duc qui n'entreprend la guerre qu'à contrecœur.
C'est au total près de 40.000 hommes qui investissent cette petite vallée de la Scance à l'Ouest de Verdun.
Le 7 septembre, Brunswick et le roi se rendirent à Clermont ; ils gravirent la hauteur ; ils virent au loin la côte de Biesme couverte de troupes ; ils apprirent, en questionnant des gens du pays, que les Français avaient déjà construit des retranchements et dressé des batteries. Le Duc se repentit alors de n'avoir pas écouté les conseils de Kalkreuth. Mais il était trop tard. Il n'essaya même pas de s'emparer du passage. Il craignit de perdre trop de monde dans une attaque où son armée serait exposée au feu plongeant de l'artillerie française, et, désespérant d'emporter de vive force la position, il préféra la tourner. C'était la manœuvre favorite des Prussiens ; la position des Français est bonne, disait-on au quartier général, mais on peut la tourner en trois marches, et on la tournera.
Goethe, voyant passer le Roi Frédéric-Guillaume II et le Duc de Brunswick, demandait ironiquement à ses amis « quelle est celle de ces deux puissances qui prime l'autre, et laquelle décidera dans les cas douteux ? »
Après quelques repos, direction MALANCOURT.
Ils trouvèrent les caves vides et les cuisines abandonnées dans des maisons que GŒTHE trouva bien rangées et paisibles, regrettant de venir troubler leur tranquillité. C'est là qu'ils apprirent que le roi, fougueux, était parti sans manteau, sans surtout, malgré une pluie épouvantable, obligeant les princes de la famille royale à le suivre en renonçant à tout vêtement propre.
«La guerre est comme une mort anticipée, rendant tous les hommes égaux, abolissant toute propriété, menaçant de fatigue et de dangers les plus augustes personnages», écrira GŒTHE.
PANNEAU 6 : Fin de séjour festif à VERDUN.
Manifestation de la témérité du Roi de Prusse ; déclaration citée plus haut.
La Forêt d'ARGONNE – THERMOPYLES - devenue une frontière naturelle par sa densité permettant d'être le refuge de brigands et seulement des forestiers s'y aventuraient car connaissant le terrain ! Arrêt stratégique nécessaire avant de s'aventurer
LA RETRAITE
Johann Wolfgang GOETHE
9 et 10 octobre 1792
C'est au milieu de cette tristesse que GOETHE eut le plaisir de retrouver son domestique et sa voiture.
“Pourtant c’est ajustement au milieu de toute ces tristesses que je vis se réaliser mon désir le plus cher. Nous rejoignîmes une voiture qui cheminait devant nous, tirée par quatre petits chevaux sans apparence et alors se déroula une joyeuse scène de reconnaissance, car c’était ma voiture, c’était mon domestique. “ Paul ! Criai-je. Mon brave drôle, c'est toi ? Comment diable, te trouves-tu ici ?". Ma malle était chargée à sa place accoutumée, et ce fut pour moi un spectacle bien réjouissant..."
Son domestique lui conta les péripéties qu'il avait dû dominer pour préserver les biens de son maître. Ensemble, ils cheminèrent vers Verdun où ils espèrent trouver un peu de repos.
Quittant BUZANCY, sortie des dangers les plus prenants, la troupe remonta la rive gauche de la Meuse puis franchit celle-ci pour prendre la route des PAYS-BAS qui mène à VERDUN .
Arrivée dans la vallée de la Meuse, à CONSENVOYE, un campement fut installé. Le malaise et la souffrance étaient au comble ; les tentes trempées, la faim tenaillant avec la fatigue, dormir fut le meilleur soporifique.
A VERDUN on pensait retrouver cette ville avec le même accueil qu'à l'aller et ainsi reprendre des forces. Malheureusement il n'en fut rien, il a fallu repartir presqu'aussitôt.
Entre temps, la "dormeuse" du Duc arriva, elle avait recueilli un jeune gentilhomme du régiment, ainsi que le valet de chambre du Duc, malades tous les deux, le prince les ayant sauvé du lazaret de GRANDPRÉ et le camérier WAGNER chargé de les soigner, il offrit à GŒTHE, une 4ème place, qu'il prit sans hésitation.
Note d'Histoire : C’est au cimetière allemand de ce village que le président français François MITTERAND, et le chancelier allemand Helmut KHOL, se sont rencontrés le 22 décembre 1984.
La Révolution Française
Nous remontions la rive gauche de la Meuse, pour arriver à l’endroit où nous devions la passer, et atteindre, de l’autre côté, la grande route ; nous étions justement dans les prairies les plus marécageuses, lorsqu’on nous annonça que le duc de BRUNSWICK était sur nos pas. Nous fîmes halte et nous le saluâmes respectueusement. Il s’arrêta aussi tout près devant nous et il me dit : « Je suis fâché de vous voir dans cette désagréable position ; cependant je dois me féliciter de ce qu’un témoin de plus, un témoin éclairé, digne de foi, pourra déclarer que nous avons été vaincus non par les ennemis, mais par les éléments. »
Près de ce village, au bord de la route de Verdun, des tentes furent dressées. Malheureusement, elles étaient transpercées et tout le matériel venait à manquer, dont les objets les plus nécessaires.
Après cette halte à Consenvoye, GOETHE prend la route de Verdun et ils repassèrent devant les mêmes endroits, sous “le sombre voile d'une pluie continue.”
A savoir : C'est à Consenvoye qu’eut lieu la rencontre entre le Chancelier de la République Fédérale d'Allemagne Helmut KOHL et le Président de la République française, François MITTERRAND, le 22 décembre 1984, une image célèbre des deux chefs d'État se tenant par la main sur cette terre qui a porté la trace de tant de souffrances.
LA RETRAITE
Après une nuit sans sommeil à Verdun et dans la plus grande confusion, Goethe pu retrouver sa voiture dont le domestique avait échangé les chevaux fatigués contre du sucre et du café. La traversée de la ville se fait dans une cohue et une confusion indescriptible, où s’entremêlent les convois de blessés.
Il prit la direction d’Étain, petite ville de la Meuse, à 16 km de Verdun
LA RETRAITE
Tous, cavaliers et piétons cherchaient à se sauver par n'importe quel chemin, n'importe quel moyen, traversant des prés inondés et des fossés débordants. Certains chevaux dépecés, mettaient en évidence la preuve d'une disette générale.
Un homme, nommé LISEUR, leur servit de guide, dans cette marée humaine. Les attentions de ce guide leur permirent d'arriver jusqu'à la place de la ville d'Etain que notre écrivain trouvait jolie, et d'y trouver une belle maison sur la place du marché. Le maître de maison et sa femme les accueillirent en les saluant respectueusement, mais restant réservés .
GŒTHE se voyant dans une glace, fut honteux de sa tenue , les cheveux longs et mal coiffés et une barbe inculte lui donnant des airs de sauvage !
Des fenêtres de cette maison GŒTHE voyait une foule très dense, des voitures chargées de bagages, des centaines de chevaux réquisitionnés, se heurtant, se bousculant, des bêtes à cornes.
«C'était comme un torrent qui vient de déborder et qui doit continuer sa course par l'arche étroite d'un pont et dans un lit resserré» écrira-t-il.
Cependant on leur avait préparé un bon repas : Gigot, bon vin, bon pain en abondance. A côté d'un grand tumulte, ce fut un moment de repos admirable dira encore l'écrivain…. Avant de reprendre leur triste chemin du retour.,
PANNEAU H :
ÉTAIN se présente comme un point stratégique laissant apparaître le revers de cette guerre, par des situations tragiques, où l'homme et l'animal sont liés par une même destinée funeste, où le chacun pour soi devient la règle de conduite, et où la moindre manifestation de charité semble miraculeuse.
A visiter : l'Église Saint-Martin, une piéta du sculpteur LIGIER RICHIER, vers 1560.
Johann Wolfgang GOETHE
La Retraite - Il faisait une nuit noire lorsqu'ils arrivèrent à Spincourt le 11 octobre 1792
En arrivant à SPINCOURT, GŒTHE , ses compagnons et des hussards se mirent en quête de trouver à se loger. L'habile et officieux LISEUR lui procura un abri, en même temps que 2 officiers allemands, aussi GŒTHE se retira dans la "dormeuse" qu'il avait retrouvé, dont le timon, était tourné cette fois vers l'ALLEMAGNE, et s'endormit bien vite.
GOETHE : “Toutes les fenêtres étaient éclairées, preuve que toutes les chambres étaient occupées. A chaque porte, les habitants protestaient qu'ils ne pouvaient recevoir de nouveaux hôtes, et les gens logés chez eux affirmaient de leur côté qu'ils ne voulaient pas de nouveaux compagnons. Mais sans façon notre hussard pénétra de force dans une maison, et y ayant trouvé quelques soldats français installés dans la grande salle auprès du feu, il les pressa de faire place devant la cheminée à quelques personnages de marque qu’il accompagnait. Comme nous entrions au même moment, aimablement les soldats se serrèrent, mais bientôt ils reprirent leur étrange posture ; ils tendirent vers le feu leurs pieds dressés en l'air. Par moment ils faisaient, en courant, un tour dans la salle, puis reprenaient tout de suite leur position première. Alors je pus remarquer que leur préoccupation essentielle était de sécher le bas de leurs guêtres.
Je ne tardais pas d'ailleurs à les reconnaître. C'étaient les mêmes soldats que j'avais vus, le matin même, marchant si délicatement dans la boue à côté de notre voiture.”
En définitive, pour sa tranquillité, Goethe ira chercher le repos dans sa vieille dormeuse dont, par expérience, il connaissait le confort.
La Révolution Française
12 octobre 1792 “Cette journée se présentait encore plus triste que la veille”. Les chevaux étaient harassés. Des voitures se renversaient, devenues de plus en plus fragiles. Les bâches des fourgons étaient crevées et ils traînaient des objets de toutes sortes sans maitres.
GOETHE continuait sa route en direction de Longwy. Passant par Longuyon il regardait non sans répulsion le désolant spectacle des cadavres abandonnés et de chevaux dépecés.
Il fut amené à réfléchir sur sa condition de brave bourgeois aisé au milieu des maux affreux de la guerre auxquels il ne s'attendait pas.
13 octobre 1792 GOETHE et ses compagnons se dirigèrent vers Luxembourg en passant par Arlon.
La campagne de France s’achève là… !!!
Dans une lettre datée du Luxembourg, Goethe écrit : « Cette retraite fera, au titre d'une des plus malheureuses campagnes qui aient été faites, une triste figure dans les annales du monde… C'est maintenant que je me suis reposé, que je me sens brisé, rompu de corps et d'âme. »